Posons les bases
Il faut un sol calcaire bien pourvu de calcaire actif, et dont le Ph soit supérieur à 7. Dans ces conditions l’arbre et certains végétaux ont besoin d’un système mycélien pour puiser le fer dans le sol. Ce fer est nécessaire pour synthétiser la chlorophylle. Il faut donc que du mycélium et des spores des truffes, que nous voulons produire, soit présents dans les sols. (S’il y a plus de spores d’autres champignons c’est l’échec à court terme)
L’arbre doit être en situation de conquête territoriale. (Si les arbres sont adultes et installés avec les autres, c’est l’échec) La variété de l’arbre est souvent un chêne concernant la truffe car il résiste bien à la manière de vivre plutôt brûlante de la truffe notamment melanosporum. Pour en revenir à la conquête, c’est ce qui s’est passé avec le phylloxéra qui avait décimé toute la vigne libérant des centaines de milliers d’hectares vers 1880 et laissé libre cours à la conquête territoriale des arbres et les centaines de tonnes de truffes produites quelques années après pendant des dizaines d’années.
La vie en commun du mycélium et de l’arbre
Le mycélium solubilise notamment le fer et quelques minéraux nécessaires à l’arbre et lui offre toute sa surface pour puiser de l’eau (des dizaines de km par arbre). En échange celui-ci lui permet de profiter de son glucose qui circule dans ses racines du moins au tout début du cycle.
Pour ce faire le mycélium crée une liaison avec une racine jeune de l’arbre que nous appelons mycorhize.
L’hiver, si les conditions du sol sont extrêmes et détruisent le mycélium, celui-ci reste en survie au niveau des mycorhizes et repartira au printemps suivant. Et ce sont grâce à toutes ses liaisons que le mycélium va croître, grandir, se densifier et survivre durant l’année, du printemps à l’hiver.
En cours de croissance, il multipliera ses liaisons avec les racines de toutes les plantes sur son passage pour leur en prélever toutes formes de sève et de glucose, d’où un aspect brûle, desséché du sol en surface. La politique de la terre brûlée est la stratégie de la melanosporum. Moins pour les autres variétés de truffes.
Cette politique agressive permet aussi d’éliminer tout le cortège fongique compétiteur de mélano mais aussi des variétés pouvant détruire l’arbre.
La naissance des truffes
Au printemps, dès que la température des sols remonte, soit en fonction des régions de mars à avril, les mycéliums repartent et les brulés réapparaissent en surface autour des arbres. Cela est dû au fait que les mycéliums puisent tout ce qui passe à leur portée pour survivre et dessèchent toutes les plantes sur leur passage.
D’autres part, les spores, enfouis dans le sol germent et vont amener, par leur densité, une grande probabilité de rencontres entre les deux sexes opposés afin de faire une descendance. Mycélium et spores sont donc inséparables.
Juste un mot sur la nécessaire souplesse et vie des sols afin que ces mycéliums puissent croitre aisément et rencontrer facilement les organes mycéliens reproducteurs. Le travail du sol est donc nécessaire et la vie du sol fera le reste s’ils sont vivants c’est-à-dire riche de faune. S’il y avait utilisation de désherbant ou autre insecticide, les truffes ne verraient plus le jour à court terme. La truffe est donc Bio bien au-delà de ce que nous pouvons imaginer. Elle n’apprécie pas non plus le piétinement important de l’homme ou des animaux ni le parcage prolongé d’animaux de ferme au-dessus d’elle. Les truffes peuvent naitre toute l’année mais ce sont les conditions atmosphériques différentes au fur et à mesure de leurs évolutions qui feront que certaines arriveront à maturité et d’autres pas.
La croissance des truffes
Toutes n’arriveront pas dans nos assiettes. Beaucoup se perdront et heureusement pour la survie de l’espèce qui n’avait pas prévue de finir dans des estomacs gourmands.
Il faut du chaud car melanosporum aime la chaleur. Pas trop de soleil brûlant en direct sur les sols. Elles aimeront se cacher sous un paillage, une touffe d’herbe ou de la mousse.
Des remontés humides par capillarité des sols assureront sa survie durant les mois chauds, très chauds de l’été. Comme les sols sont tous différents cela rend tout de suite très aléatoire la survie des truffes. Dans des argiles qui, en séchant se rétractent, il faut des pluies régulières. Dans des sols plus sableux, l’eau stockée dans les interstices peut maintenir la truffe en vie de très longues semaines. C’est au producteur de connaitre ses sols et de faire les bonnes interventions si besoin.
5 mois sont, au minimum nécessaire pour le processus de croissance jusqu’à la maturité. Mais la truffe peut mettre plus de temps. Aussi des truffes sorties de terre en juillet et bien protégées peuvent être ramassées en février soit 7-8 mois.
Les pluies d’été (malheureusement de plus en plus rares) et de septembre vont les faire croître. C’est aussi la richesse faunistique des sols qui va contribuer à leur apporter ce qu’elles ont besoin en plus de la relation qu’elles conservent avec les racines de l’arbre (on constate d’ailleurs qu’un arbre en bonne santé a plus de chances d’avoir des truffes en bonnes santé). Il faut de vrais sols vivants avec toute une diversité d’insectes pour réussir de bonnes plantations truffières. Grâce à une très fine houppe mycélienne l’entourant mais invisible à l’œil nu, la truffe va absorber tout ce qui passe à sa portée. Les sols riches en herbes aromatiques telles que thym, lavande, sarriette, immortelle, tombées sur le sol puis transformées (par la faune) tout en conservant une partie des huiles essentielles vont être absorbées par la truffe ce qui explique les parfums et goûts très différents des tubercules d’une truffière à l’autre, voire d’un arbre à l’autre. C’est la notion de terroir tout simplement.
La maturation
Il faut des différences de pressions atmosphériques avec des changements de températures du sol pour déclencher le processus de la mélanisation (coloration). Pour les parfums c’est plus une température des sols en dessous de 14 et jusqu’à 0°c. (On trouve parfois des truffes noires à mi-octobre alors qu’il n’y a pas encore eu de froid sur les truffières).
Attention toutefois au gel, qui signe la destruction de la truffe. Les températures basses favorisent la mélanisation donc permettent à la truffe de se colorer en noir. Ne pas oublier que la truffe, est l’organe de reproduction de l’espèce et qu’elle est destinée à être ingéré par un animal ou insecte pour disséminer ses spores. Nos fosses septiques modernes n’avaient pas été prévues dans le schéma initial.
A maturité, les spores se forment dans la truffe et sont prêts pour le grand voyage. C’est le moment de la récolte mais si d’autres prédateurs précèdent le ramasseur, les spores continueront leurs vies dans les sols et contribueront au renouveau de l’espèce.
Pour des arômes parfaits, c’est la ventilation des sols qui permettra ce prodige. Des pluies excessives, des sols gorgés d’eau et les arômes ne sont pas au top. Les gelées blanches si prisées des producteurs ne font que cristalliser la croûte superficielle des sols rendant plus favorables leur aération et par la même, la respiration des truffes.
Conservation des truffes
Le mieux est de mettre les truffes dans un récipient hermétique pourvu de papier absorbant de façon à ce que la truffe ne touche jamais les parois du récipient. Au frigo à 2°C. Vérifier les truffes chaque jour et changer le papier absorbant de même. Si l’une d’elle vient à mollir, il faut l’éliminer ou éliminer la partie dégradée. La truffe fraiche est ferme naturellement. Toute autre consistance n’est pas conforme.
Le fait de les mettre dans du riz les fera sécher en les rendant impropres à une utilisation ultérieure (car trop sèches) mais donnera un arôme puissant au risotto à venir.